Cette vidéo, Lille -  Davos, a pour origine la découverte par l'artiste, Michelle Naismith, du quartier Euralille à Lille et en particulier de son Centre Commercial, le plus important de la Région Hauts-de-France (68 000 m2).

Elle s'est ainsi aperçue que l'on pouvait y vivre sans jamais en sortir.

Il y a dans ce centre tout ce que la vie est nécessaire au quotidien, les commerces, l'alimentation, la pharmacie, les banques, le parking pour la voiture, l'accès direct aux trains, notamment l'Eurostar qui permet de relier Londres en 1h20 ou Paris en 1 heure, ou encore Bruxelles, ville où Michelle Naismith réside, en moins d'une demi-heure.

Mais il y a aussi un lieu œcuménique dédié aux différentes religions, des agences de voyages, des salles de spectacles, dont l'Aéronef, un espace d'exposition, le Tri-Postal, des écoles de commerce, notamment Skema, des salles de sports, des bureaux pour entreprises, des hôtels, des résidences pour étudiants. Il y a même un commissariat de Police.

Tout cela sans jamais sortir à l'air libre.

Michelle Naismith s'intéresse aux univers clos ainsi qu'aux dépendances et différentes addictions qu'elles induisent.

Ses films, photographies et installations témoignent de cet intérêt.

 

En ces temps de Covid-19, le parallèle avec l'une de nos dernières pandémies, la tuberculose, surnommée au début du vingtième siècle "la peste blanche", lui est apparue évidente.

La tuberculose a sévie jusqu'en 1946, date à laquelle fut trouvée le vaccin qui l'a quasiment éradiqué de la planète.

La tuberculose est une maladie infectieuse causée par une bactérie qui se transmet par voie aérienne, avec des signes cliniques variables. Elle touche le plus souvent les poumons et peut atteindre d’autres organes.

La similitude avec le covid-19 et de ce point de vue évidente.

Pour remédier à la tuberculose, il n'y avait alors qu'un seul et même remède, isoler le malade dans un établissement spécialisé, le plus souvent un sanatorium.

C'est ainsi que se sont créés des sanatoriums, principalement en Europe.

Ces sanatoriums ont été massivement construits au début du XXe siècle dans des régions isolées de la pollution, en montagne, sur des plateaux ensoleillés ou face à la mer pour bénéficier du grand air et des vertus désinfectantes et reconstituantes du soleil.

Michelle Naismith a alors pensé au livre de Thomas Mann, La Montagne magique. Écrit entre 1912 et 1924, La Montagne magique est l’un des romans majeurs du vingtième siècle. Cette œuvre magistrale radiographie une société décadente et ses malades, en explorant les mystères de leur psychisme.

Thomas Mann a obtenu le Prix Nobel de Littérature en 1929.

Son œuvre, influencée par Arthur Schopenhauer, est centrée sur l'étude des rapports entre l'individu et la société.

Dans La Montagne magique, le jeune Hans Castorp rend visite à son cousin dans un luxueux sanatorium de Davos, en Suisse. Piégé par la magie de ce lieu éminemment romanesque, captivé par des discussions de haut vol, il ne parvient pas à repartir.

Le jeune Allemand découvre son attirance pour un personnage androgyne et, au mépris du danger, se laisse peu à peu envoûter par cette vie de souffrances, mais aussi d’aventures extrêmes en montagne et de dévergondage, où fermentent des sentiments d’amour et de mort.

Michelle Naismith a souhaité mettre en relation ces deux univers, Euralille et son centre commercial et l'Hôtel Schatzalp, à un siècle de distance et 1000 km, l'un de l'autre.

L'Hôtel Schatzalp n'est ni plus ni moins que l'ancien sanatorium de Davos décrit par Thomas Mann, maintenant reconverti en hôtel, mais qui a conservé toute son apparence de l'époque, notamment sa décoration dans le style Art Nouveau.

Le film de Michelle Naismith se propose ainsi d'explorer ces deux espaces qui se situent dans des temporalités différentes, mais qui, toutes deux, interrogent le rapport de l'individu au monde et surtout à son environnement, tant social que justement environnemental.

De Lille à Davos mettra en scène une personne, jeune femme, que l'on ne verra jamais à l'image mais qui sera omniprésente à travers une voix off.

C'est elle qui sera le fil conducteur de cette histoire, de cette vidéo, passant d'un univers contemporain, Euralille, à cet univers venu du début du XXème siècle, l'Hôtel/Sanatorium de Davos.

Avec, en arrière plan les problèmes actuels, liés à la pandémie du covid-19 et la manière d'y remédier.